L'alliage de cobalt-chrome

Caractéristiques
de l’alliage CoCr

L’alliage de Cobalt-Chrome est un alliage non-magnétique, résistant à l’usure, à la corrosion et aux fortes températures. Le plus répandu des alliages de cobalt utilisé dans le secteur médical est le Co-28Cr-6Mo (Co212-H suivant ASTM F75). C’est l’alliage utilisé par SLS France pour nos produits dentaires imprimés en 3D.

L’ensemble des composants joue un rôle essentiel dans les caractéristiques de cet alliage.  

  • Le cobalt est connu pour sa dureté et la résistance aux rayures.
  • Le chrome permet une bonne résistance à la corrosion avec la formation d’une couche d’oxyde.
  • Le molybdène diminue la taille de grain et apporte de la résistance mécanique à l’alliage.

La résistance à l’usure des alliages est attribuée à la structure en 2 phases de carbures durs noyées dans une matrice tenace en cobalt.

Le fort potentiel énergétique du chrome permet la repassivation rapide dans le cas d’une usure de la surface *.

Exigences réglementaires européennes

Plusieurs changements s’opèrent en 2021 : d’une part l’Agence Européenne des Produits Chimiques (ECHA) a inclus le cobalt dans la liste des produits « CMR » (risques Cancérigène, Mutagène, et pour la Reproduction) et d’autre part entre en vigueur le nouveau règlement pour la mise sur le marché des dispositifs médicaux au sein de l’Union Européenne.

Que vont impliquer ces évolutions règlementaires pour les dispositifs médicaux en CoCr fabriqués par SLS France ?

  • Classification Européenne

Il existe plusieurs classifications des agents chimiques quant à leurs dangers « CMR » mais seule la classification de l’Union Européenne est règlementaire en France.

La réglementation en matière de classification, d’étiquetage et d’emballage des substances et préparations dangereuses est encadrée par le règlement (CE) n° 1272/2008 dit « règlement CLP » qui est entré en vigueur le 20 janvier 2009 (remplaçant les directives 67/548/CEE, Dangerous Substances Directive et 1999/45/CE, Dangerous Preparation Directive).

La liste des substances ayant fait l’objet d’un classement CMR européen harmonisé figure dans l’annexe VI du « règlement CLP »

Sont considérées comme agent CMR toutes substances ou toutes préparations :

  • Cancérogènes (C) : substances et mélanges qui, par inhalation, ingestion ou pénétration cutanée, peuvent provoquer un cancer ou en augmenter la fréquence.

ou/et

  • Mutagènes (M) : substances et mélanges qui, par inhalation, ingestion ou pénétration cutanée, peuvent produire des défauts génétiques héréditaires ou en augmenter la fréquence.

ou/et

  • Toxiques pour la reproduction (R) : substances et mélanges qui, par inhalation, ingestion ou pénétration cutanée, peuvent produire ou augmenter la fréquence d’effets nocifs non héréditaires dans la progéniture ou porter atteinte aux fonctions ou capacités reproductives.

 

Définition des catégories de dangers

Le règlement CLP introduit des catégories de dangers qui définissent le niveau de preuve de l’effet CMR observé :

 

Classes de danger

Catégories

Définitions des catégories

Cancérogénicité

Catégorie 1A

Substances dont le potentiel cancérogène pour l’être humain est avéré.

Catégorie 1B

Substances dont le potentiel cancérogène pour l’être humain est supposé.

Catégorie 2

Substances suspectées d’être cancérogènes pour l’homme.

Mutagénicité sur les cellules germinales

Catégorie 1A

Substances dont la capacité d’induire des mutations héréditaires dans les cellules germinales des êtres humains est avérée.

Catégorie 1B

Substances dont la capacité d’induire des mutations héréditaires dans les cellules germinales des êtres humains est supposée.

Catégorie 2

Substances préoccupantes du fait qu’elles pourraient induire des mutations héréditaires dans les cellules germinales des êtres humains.

Toxicité pour la reproduction

Catégorie 1A

Substances dont la toxicité pour la reproduction humaine est avérée.

Catégorie 1B

Substances présumées toxiques pour la reproduction humaine.

Catégorie 2

Substances suspectées d’être toxiques pour la reproduction humaine.

 

Le Cobalt sera classé à partir de septembre 2021 comme une substance C1B, M2 et R1B (seules les substances classées CMR de catégorie 1A/1B sont soumises à restriction) :

  • C1B : Substances dont le potentiel cancérogène pour l’être humain est supposé,
  • M2 : Substances préoccupantes du fait qu’elles pourraient induire des mutations héréditaires dans les cellules germinales des êtres humains,
  • R1B : Substances présumées toxiques pour la reproduction humaine, avec l’indication d’un risque présumé uniquement sur la fertilité et pas sur le développement du fœtus (classification comme H360F).

SLS France est particulièrement attentif/sensible aux risques apportés par les matériaux utilisés pour les dispositifs médicaux et met toutes ses compétences et savoirs au service des utilisateurs de ses produits (lien vers partie 4 et 5).

A compter du 26 mai 2021, tous les dispositifs médicaux seront soumis à un nouveau règlement européen (RDM) (UE) 2017/745). Ce nouveau règlement a pour objectif d’harmoniser la législation des dispositifs médicaux au sein de ses pays membres de l’union européenne. Il conserve le principe du marquage CE, mais il détaille et renforce les exigences permettant de l’obtenir.

 

Concernant les substances classées CMR, le règlement demande de :

  • Limiter dans la mesure du possible la présence de substance CMR de catégorie 1A ou 1B à une dose inférieure à 0,1% (m/m) lors de la conception et de la fabrication.
  • Au-delà de ce seuil, une justification argumentée doit être réalisée permettant :
    • d’évaluer l’exposition potentielle du patient à la substance CMR,
    • de montrer une analyse de matériaux de substitution accompagné d’un argumentaire expliquant que ces matériaux de substitution ne conviennent pas pour maintenir le fonctionnement et les performances du produit.
  • Un étiquetage informant la présence de ces substances doit être prévu.
  • Etude de l’utilisation clinique du Cobalt-Chrome (DOC0549B) dans les dispositifs médicaux dès 2019, avec une actualisation en avril 2021. (Lien vers partie 5)
  • Evaluation de la biocompatibilité de nos dispositifs médicaux en CoCr selon les normes ISO 10993-1 et ISO 7405. (Lien vers partie 3)
  • Actualisation de nos étiquettes d’ici le 26 mai 2021 (ajout du logo et du texte « CMR 1B »).

Biocompatibilité des dispositifs médicaux en alliages CoCr

Du fait de la présence d’une couche d’oxyde à sa surface, l’alliage de Cobalt-Chrome présente une résistance « naturelle » à la corrosion, et donc libère peu d’éléments dans les milieux physiologiques, ce qui en fait un matériau biocompatible, utilisé depuis de nombreuses années comme prothèse dentaire et plus récemment en chirurgie ostéo-articulaire.

Pour le secteur dentaire, les alliages en Co-Cr présentent une excellente résistance à la dégradation dans l’environnement buccal, notamment avec la couche d’oxyde ou d’hydroxyde stable en surface. Seuls les matériaux avec un potentiel élevé pour reconstruire cette couche stable peuvent être utilisés comme implant permanent *.

Les avantages de l’alliage Cobalt-Chrome :

      • + Protocole de céramisation
      • + Polissage
      • + Résistance thermique

Le cobalt-chrome est également très utilisé dans les prothèses articulaires notamment grâce à sa résistance à l’usure. Cet alliage est utilisé pour sa facilité de mise en œuvre, pour l’obtention d’une surface bien polie nécessaire à la connexion métal-métal.

Cette liaison métal-métal est critique à gérer avec la corrosion et le frottement entre la tête fémorale et la cupule. Le cas de formation de débris devient plus critique lorsque les prothèses sont posées sur des jeunes actifs, avec une accumulation de débris sur du plus long terme. 

Malgré sa longévité d’utilisation dans les prothèses dentaires sous forme d’alliage CoCr, la récente classification de l’élément cobalt comme substance CMR peut générer des inquiétudes quant à son utilisation comme dispositif médical. Il faut noter que l’ensemble des produits contenant l’élément Cobalt ont été classés comme CMR sur la base de résultats essentiellement obtenus avec des sels de cobalt. Il est en effet établi que les sels de cobalt présentent une toxicité avérée pour l’organisme (potentiel carcinogène et effet sur la reproduction). Ces produits chimiques sont d’ailleurs classés parmi les substances extrêmement préoccupantes (SVHC, substance of Very High Concern), ce qui n’est pas le cas du cobalt métal. Les études réalisées avec le cobalt sous forme « métal » ont révélé une toxicité supposée uniquement lors d’exposition par inhalation de poussières de métal et localisée au poumon. Mais les autorités européennes ont néanmoins généralisé la classification à l’ensemble des composés contenant du cobalt, quelle que soit la voie d’exposition.

L’alliage CoCr est considéré comme un alliage biocompatible. Des risques relatifs à son utilisation comme prothèse (pour le patient) peuvent néanmoins subsister et sont liés aux possibilités de corrosion dans l’organisme humain. Des risques relatifs à sa manipulation par les professionnels de santé (prothésistes dentaires, chirurgiens-dentistes) et par les personnels impliqués dans la production des dispositifs médicaux ont également été identifiés et résultent essentiellement de la production de poussières (particules).

  • La corrosion 

L’analyse des risques biologiques concernant les alliages CoCr a montré que c’est la libération des éléments Cr ou Co par corrosion ou usure qui peut être responsable des effets toxiques de l’alliage. La corrosion est un phénomène naturel qui se produit dans certains environnements et contamine les tissus environnants, en libérant des débris *. Une corrosion limitée est liée à la capacité de l’alliage à former une barrière à la surface, comme c’est le cas pour l’alliage CoCr et sa couche d’oxyde protectrice. La corrosion est d’ailleurs plus importante avec les alliages d’acier inoxydable que pour les alliages de cobalt ou de titane *.

Dans la cavité buccale, les implants et/ou prothèses métalliques peuvent être exposés à l’usure (dégradation de type mécanique) ou à la corrosion (dégradation de type chimique) en raison de facteurs environnement tels que la salive, les micro-organismes, les variations de pH et de température liées aux prises alimentaires ou de médicaments. En revanche, l’usure par frottement est limitée du fait de la faible surface des prothèses dentaires, contrairement aux prothèses articulaires. 

  • Effets des débris dans l’organisme

A la suite de l’usure ou de la corrosion, deux types de « débris » peuvent être libérés :

  • D’une part des particules qui exercent majoritairement des effets locaux sur le système immunitaire et peuvent induire de l’inflammation ou des processus allergisants (hypersensibilité). Ces particules peuvent également altérer le tissu osseux en stimulant l’ostéolyse. Les particules sont tout particulièrement libérées lors de frottements entre parties métalliques, comme pour les prothèses articulaires.
  • D’autre part des ions métalliques chargés positivement qui peuvent se lier aux protéines. Ce sont essentiellement ces formes de débris qui sont identifiés comme substances pouvant exercer des effets toxiques carcinogènes, mutagènes ou sur la reproduction. La liaison du métal aux protéines va également permettre à celui-ci d’être transporté par voie systémique et stocké ou excrété. Le Co est ainsi transporté par voie sanguine et éliminé par l’urine en 48h.

Aucun lien entre la libération de métal et la toxicité bactériologique, métabolique, immunologique et cancérogène n’est établie *.

  • Risques spécifiques au secteur dentaire

Les études de relargages ont été réalisé notamment en réponse aux implants de hanche métal/métal ASR de Depuy. Ces implants ont fait l’objet de rappel et les patients implantés sont sous-surveillance. La littérature est claire : aucun cas de cancer n’est lié au matériau. La dégradation est liée aux inflammations générées par les particules libérées par la corrosion entre le contact métal/métal.

La quantité relarguée annuellement par les prothèses dentaires est nettement inférieure aux quantités ingérées naturellement dans l’alimentation.

L’ensemble des études montre qu’il n’y a aucun risque à l’implantation comme à l’utilisation de Cobalt dans les dispositifs médicaux. Tous les matériaux médicaux et dentaires relarguent des particules.

Il faut tenir compte de la différence entre études sur implant dentaire et implant orthopédique. La surface d’un implant/prothèses dentaire est plus petite qu’un implant orthopédique. De plus, aucune force de frottement n’est appliquée aux implants/prothèses dentaires. Les quantités de métal relarguées sont moins importantes en ce qui concerne les implants/prothèses dentaires *.

Dans le domaine dentaire, la majorité des effets toxiques observés concerne des réactions allergiques. 

D’après l’étude REACH les risques se trouvent principalement au niveau du travail de la matière. Le risque de cancer se situe lors de l’inhalation pendant l’utilisation des sels de Cobalt utilisés dans le traitement de la matière première ou le traitement de surface des outils de coupes. Bien qu’aujourd’hui les données sont trop faibles pour pouvoir conclure.

Pour assurer à la fois la sécurité et l’efficacité d’emploi de ses dispositifs médicaux, et dans le cadre de sa démarche continue de qualité et de gestion du risque, la société SLS France a mis en place une procédure d’évaluation continue de la biocompatibilité des dispositifs médicaux fabriqués en CoCr selon les normes ISO 10993-1 (dispositifs médicaux) et 7405 (spécifique aux produits du domaine dentaire).

Ayant identifié la corrosion comme le risque majeur pour nos alliages en CoCr, nous avons d’abord évalué les quantités d’éléments relargués par nos dispositifs après immersion dans un milieu physiologique adapté à la situation clinique de nos dispositifs : la salive humaine.  Les résultats que nous avons obtenus montrent que :

  • Il existe une libération d’éléments chrome très faible et plus importante d’éléments cobalt
  • Pour le cobalt, l’exposition calculée à partir des données expérimentales pour un dispositif médical de type implant dentaire se situe bien en-dessous de la dose maximale tolérée pour un individu.

Néanmoins, la toxicité potentielle associée au relargage dépend fortement de la forme physico-chimique des éléments libérés. Nous avons donc décidé de réaliser une étude exhaustive des effets toxiques des alliages CoCr in vitro pour garantir la sécurité des utilisateurs de ces produits en excluant les risques résiduels liés aux formes physico-chimiques des éléments libérés. 

A ce jour, les tests pratiqués sur les alliages CoCr fabriqués par fusion laser par la société SLS France n’ont montré aucun effet :

– Sur la viabilité et la prolifération de cellules en culture par les composés extraits des alliages en conditions physiologiques

– Sur l’induction d’effet génotoxique (mutations géniques ou chromosomiques) par les composés extraits des alliages

Les tests d’irritation sont encore en cours d’analyse. Si ces tests se révèlent négatifs également, il ne sera pas envisagé de poursuivre l’évaluation biologiques par des essais de toxicité systémique ou d’implantation.

Il est donc d’ores et déjà possible de conclure, sur la base de ces résultats expérimentaux et des données publiées de toxicologie, que les composés relargués par les alliages de CoCr, à savoir majoritairement le cobalt, n’exercent pas d’effet toxique majeur in vitro.

Les préconisations

De conception :

Le matériau n’est pas le seul facteur important pour une bonne biocompatibilité avec le moins de corrosion possible. Il est également important de considérer les procédés de conception, de fabrication, de finition ainsi que le protocole de chirurgie*.  

Les étapes de finition jouent également un rôle important et doivent être maitrisées. Une vitesse de refroidissement rapide du CoCr et une fine microstructure, permettent d’obtenir un matériau plus résistant à la corrosion. De cette façon, il y a moins de libération de métaux dans les fluides biologiques*. C’est également le cas pour l’état de surface : une surface polie montre une meilleure cytocompatibilité que les métaux bruts de fabrication, car générant moins de corrosion de surface*.

Une étude montre que le procédé de fabrication par additive manufacturing n’altère pas la biocompatibilité*.

La prolifération et la viabilité des cellules osteoblast-like montre une augmentation régulière . Des ions peuvent également interférer avec les surfaces des prothèses, tel que les ions fluorure. Il a été cependant observé que les produits issus de la fabrication additive sont moins sensibles à ces ions que les éléments coulés*.

 

Pour le plan de traitement :

  • Privilégier une continuité des matériaux avec ceux déjà présents en bouche pour éviter la corrosion par une réaction électrochimique d’oxydo-réduction.
  • Identifier les patients présentant des allergies au Cobalt ou Chrome et donc non éligibles pour les prothèses en alliage CoCr.

Pour le travail de la matière :

Dans l’ensemble des métiers utilisant le métal, le travail sur les matériaux nécessite de prendre des précautions, que cela soit pour les poudres de ciment dans la construction, les composites dans l’aéronautique ou les poussières de céramique ou de métal dans les laboratoires dentaires.

Dans les laboratoires, il est conseillé d’effectuer vos travaux dans des pièces comportant un système d’aspiration performant et de porter des équipements de protection individuelle (EPI : masque, lunettes, blouse).

Chez SLS France nous avons fait le choix d’investir dans des combinaisons intégrales avec filtration d’air afin de limiter au maximum les risques pour le personnel intervenant sur les activités de production. Les zones à risques sont en outre interdites sans le port d’EPI.

* Se référer au dossier Cobalt Chrome dans la bibliothèque technique